Le pâturage se remplit de poussins blancs de la race Lohmann Sandy qui, d’abord hésitants, puis de plus en plus vaillants, grattent le sol, picorent et s’égaillent prestement dans tous les sens. «Ils n’ont que cinq semaines et s’habituent tout juste au pâturage», explique l’agriculteur bio Markus Schütz. «Bientôt, ils seront plus vaillants et iront courir loin derrière l’enclos.» Mais ce qu’il faut retenir avant tout, c’est que, dans un autre schéma de production, tous ces petits coqs blancs et duveteux ne connaîtraient pas les joies de la vie en pâturage. Car ils ne seraient tout simplement plus en vie.
Qu’entend-on vraiment par «frère coq»? Venez visiter avec nous la ferme bio Schütz à Strengelbach (AG) et découvrez pourquoi l’élevage de coqs frères a toute sa place dans la filière de production éthique d’œufs et le mouvement bio. Sur leur exploitation, Barbara et Markus Schützen font la part belle au bonheur des frères coqs – «Güggelglück». En effet, en élevant les frères des poules pondeuses, le couple offre à ces derniers une vie digne.
Quel est le rapport entre le frère coq et le mouvement bio?
Dans l’agriculture, on travaille principalement avec des races spécialisées à haut rendement pour la production d’œufs ou de viande. Mais cela signifie que les frères des poules pondeuses ne peuvent pas développer de la viande aussi rapidement et en aussi grandes quantités. C’est pourquoi, dans la filière classique de production d’œufs, les poussins mâles sont systématiquement mis à mort dès leur éclosion. Cette pratique a hérissé le mouvement bio, car tous les êtres vivants sont importants et ont droit au respect.
Bio Suisse lance un mot d’ordre: «Tous les poussins ont le droit de vivre!»
Le secteur bio a parlé d’une seule voix: à partir de 2026, plus aucun poussin ne sera mis à mort sous le label Bourgeon. De nombreuses fermes bio se sont déjà engagées dans cette voie – ainsi la ferme bio Schütz avec son élevage de coqs frères. Acheter des œufs suisses Bourgeon Bio, c’est soutenir le bien-être animal et une production d’œufs éthique et durable.
Dans l'agriculture conventionnelle, les poussins mâles sont éliminés dès l'œuf : Avec la technologie in ovo, le sexe de l’embryon de poule est déterminé le 12e jour d’incubation par une méthode non invasive. Cette innovation sera généralisée à partir de 20265. Les agriculteurs et agricultrices bio rejettent ce procédé.
Conseils de recettes à la viande de frère coq et à la poule à bouillir
Dans leur ferme bio, la famille Schütz mise depuis longtemps sur le frère coq - « Güggelglück », en somme. Markus et Barbara Schütz en font une bonne expérience. Markus Schütz trouve dommage que les consommateurs de viande ne jurent souvent que par les morceaux nobles. En ce qui concerne le poulet, on sait que c’est le blanc de poulet tendre qui a toutes les faveurs.
Et pourtant, il y a tant d’autres choix: «Nous utilisons encore les poules pondeuses dans les recettes de poule à bouillir, afin de faire honneur à l’animal entier. Comme ces poules sont plus âgées, elles ont eu plus de temps pour développer des arômes. Et la chair des frères coqs est elle aussi un peu plus ferme, mais on peut en tirer beaucoup si l’on s’intéresse un peu à l’élevage des animaux.» Les frères coqs peuvent bouger davantage et présentent donc une structure musculaire différente de celle des poulets de chair. Par ailleurs, les animaux se développent plus lentement. Barbara Schütz, cuisinière de formation: «N’ayez pas peur de la préparation!» Son principal conseil pour la préparation de la viande de frère coq et de la poule à bouillir: «Cuisiner peut procurer tant de joie si l’on est ouvert et que l’on a un peu d’audace. La viande précieuse d’un point de vue éthique est merveilleuse, il suffit d’essayer des choses, pourquoi pas en panant un peu la viande ou en la faisant revenir rapidement.»
Dans leur magasin à la ferme, la famille Schütz vend, outre des poulets à bouillir, différents morceaux de viande de coq fratricide à rôtir à court terme, mais aussi des saucisses ou des galettes pour burger. La bonne nouvelle, c’est que les réactions des clients s’avèrent très positives et que la demande est forte.
Les végétariens aussi achètent de la viande de coq
Barbara Schütz se réjouit particulièrement du sens des responsabilités de sa clientèle en matière de vente directe. Certains achètent surtout des œufs bio et ont une alimentation végétarienne. Mais chaque année, ces mêmes clients, qui connaissent tout le cycle de vie des animaux, achètent aussi une poule à bouillir et de la viande de «coqs heureux» estampillée «Güggelglück», dont ils régalent leur entourage. «C’est une grande marque de respect pour l’animal. Car la poule pondeuse a encore des atouts à faire valoir, même comme poule à bouillir. Or il en va de même pour la viande de frère coq, qui a toute sa place dans la filière de production d’œufs éthique.» Nous obtenons ainsi un cercle vertueux.
Ferme bio Schütz
Markus et Barbara Schütz prouvent qu’il est possible de défendre avec succès la cause d’une production d’œufs bio éthique en élevant des coqs frères à grande échelle: le couple lui-même possède deux poulaillers avec pas moins de 2’000 poules pondeuses ou coqs frères chacun. C’est le nombre maximum d’individus autorisé en agriculture biologique. Ils exploitent par ailleurs 65 hectares de cultures maraîchères (courgette, haricot, épinard, entre autres) et produisent leur propre alimentation pour leurs animaux. La ferme bio Schütz en est déjà à sa quatrième génération et mise sur le label Bourgeon depuis la reprise de l’exploitation par Markus et Barbara Schütz en 2009.
Redaction: mAYA fROMMELT, photos: lUC kÄMPFEN