Un entretien avec Anik Thaler, fondatrice de Fabas.
Le falafel et le houmous sont sur toutes les lèvres, y compris ici en Suisse. Mais malheureusement, les légumineuses utilisées viennent presque toujours de l’étranger. Chez Fabas, on voit les choses autrement: cette jeune start-up souhaite mettre sur pied une offre nationale en proposant des produits radicalement locaux à base de protéines végétales. Les agriculteurs-trices bio suisses sont invités à profiter de cette tendance et à cultiver davantage de légumineuses bio.
Anik Thaler, qu’est-ce qui t’a amenée, à l’âge de 21 ans, à fonder Fabas?
Pendant mes études d’agronomie à l’EPF de Zurich, je me suis rendu compte que la quasi-totalité des ingrédients des produits végétaux prêts à l’emploi était importée. C’est embêtant, car nos agriculteurs-trices sont quasiment court-circuités et que les sols suisses ne profitent pas de la culture de légumineuses bio.
Étant donné que du point de vue nutritionnel et agronomique, je vois un grand potentiel dans les protéines végétales et que je ne comprends pas pourquoi les légumineuses ont toujours été importées jusque-là, j’ai commencé à concocter des recettes de houmous à base d’ingrédients suisses dans ma propre cuisine et à chercher un agriculteur suisse prêt à cultiver avec moi des pois chiches bio directement ici en Suisse. Et petit à petit, l’idée de fonder Fabas et de créer ainsi une offre de légumineuses bio suisses a fait son chemin.
Vidéo Fabas
Les bienfaits des légumineuses bio
Les légumineuses sont riches en protéines, en fibres et autres nutriments importants, ce qui en fait une excellente base pour une alimentation équilibrée. Les légumineuses sont bénéfiques non seulement pour les humains, mais aussi pour le sol: les légumineuses bio suisses contribuent à une agriculture saine, car elles poussent sans pesticide chimique de synthèse, enrichissent le sol en azote et augmentent la biodiversité.
A-t-il été difficile de trouver des agriculteurs-trices suisses qui produisent des légumineuses bio?
La culture de pois chiches bio est relativement nouvelle en Suisse. Heureusement, il existe de nombreux producteurs-trices bio innovants qui souhaitent intégrer cette culture dans leur rotation des cultures ou du moins l’essayer. Trouver suffisamment de producteurs-trices intéressés par la culture de légumineuses pour Fabas s’est donc avéré étonnamment rapide. Aujourd’hui, nous sommes littéralement submergés de demandes et avons une liste d’attente.
Pour les producteurs-trices, les nouvelles cultures, telles que les pois chiches, comportent un certain risque, car nous manquons encore d’expérience en Suisse. La culture de pois chiches bio est particulièrement exigeante, car aucun pesticide chimique de synthèse n’est utilisé pour protéger la plante contre les parasites. Chez Fabas, nous offrons aux entreprises bio la garantie d’un débouché pour leur récolte, ce qui rend cette culture plus attrayante pour elles. Nous conseillons et soutenons les producteurs-trices.
Quels sont les défis auxquels vous êtes confrontés en tant que jeune start-up?
Nous avons connu une période mouvementée! Nos falafels, burgers aux haricots et houmous ont beau être disponibles dans de nombreux magasins bio, ainsi que chez Alnatura, Farmy ou Mahler & Co, il n’en reste pas moins que le quotidien d’une start-up alimentaire n’est pas de tout repos: planification des quantités, production et distribution, relations avec les producteurs-trices bio et les distributeurs-trices, marketing, perfectionnement des recettes, mise en place des filiales de distribution, etc. Nous ne sommes actuellement que trois pour venir à bout de toutes ces tâches. À mes côtés, Lena travaille en particulier pour le service marketing et s’occupe de tous les aspects juridiques. En tant que technologue en denrées alimentaires, Katharina consacre la plupart de son temps à un projet de recherche sur les substituts végétaux, qui doit nous permettre à terme de vendre encore plus de légumineuses suisses.
En Suisse, le manque de soutien financier en faveur des légumineuses est un autre casse-tête pour nous: les paiements directs sont relativement faibles, à savoir deux fois moins élevés que ceux des betteraves sucrières. Nous ne bénéficions d’aucune prime à la transformation, comme c’est le cas pour le fromage.
Fabas remporte le Grand Prix Bio Suisse
Le Grand Prix Bio Suisse, dont la dotation s’élève à 10’000 francs, récompense les projets innovants et durables du secteur du bio en Suisse. Le jury juge les candidat-e-s sur des critères tels que la force d’innovation, l’utilité du projet pour la production bio, les retombées pour la région, les apports écologiques et sociaux et les perspectives d’avenir. Fabas a remporté le prix en s’imposant face à 24 autres projets.
Où produisez-vous vos délicieux falafels bio et vos burgers aux haricots bio?
Pour plus de flexibilité, nous avons externalisé la production dès le début. Cela nous permet en outre d’utiliser des installations existantes plutôt que d’en acheter de nouvelles! Nous produisons les falafels et les burgers chez Fredag, à Root, et le houmous est produit à Zurich par la boucherie Angst. Les gens sont toujours étonnés lorsque nous leur disons que notre houmous végan vient de chez le boucher. Les machines de boucherie se prêtent merveilleusement bien à la production de houmous. Nous sommes ravis qu’une boucherie traditionnelle soit fière d’élargir son offre en proposant aussi des produits à base de matières premières végétales.
À propos d’Anik Thaler
La Zurichoise, aujourd’hui âgée de 25 ans, a étudié l’agronomie à l’EPF de Zurich et fondé Fabas au cours de ses études. Le nom Fabas vient de «Fabaceae», le nom botanique de la famille des légumineuses. Son plat préféré est le burger aux haricots de Fabas.
Rédaction: Maya Frommelt, Images: Fabas