À quels défis la viticulture biologique doit-elle faire face?

15. juin 2023

La viticulture biologique est en plein essor, et la demande de vins aussi naturels et exempts de pesticides que possible a fortement augmenté ces dernières années. Comment les viticulteurs bio gèrent-ils les maladies et les nuisibles et quelle est l’influence du climat et du travail du sol? Et à quoi pourrait ressembler la viticulture durable à l’avenir?

Andreas Häseli, agronome diplômé, est conseiller en matière d’arboriculture et de viticulture au FiBL (Institut de recherche de l’agriculture biologique de Frick). En plus de ses activités professionnelles, il entretient à titre privé son propre petit vignoble, où il cultive entre autres la variété PiWi Solaris. L’expert partage avec nous ses connaissances et conclusions dans le domaine de la viticulture biologique.

Andreas Häseli, quelles sont les difficultés auxquelles vous devez faire face dans la viticulture biologique?
L’oïdium et cie nous rendent la vie difficile. Les moyens de protection des plantes étant très peu nombreux et, par rapport à la culture conventionnelle, moins efficaces, les mesures indirectes sont d’autant plus importantes. Un sol sain et vivant est la base d’une croissance harmonieuse de la vigne et du renforcement de ses défenses propres. La création de la plus grande biodiversité possible offre un habitat et de la nourriture à de nombreux insectes bénéfiques qui peuvent tenir les nuisibles à distance. Pour créer de tels sols vivants et un écosystème intact, il faut du temps et une mise en œuvre correcte des mesures.

Existe-t-il d’autres mesures pour favoriser la santé des vignes?
Oui, par exemple une défoliation précoce et modérée de la zone de la vigne entraîne non seulement une augmentation du succès de la protection des plantes grâce à une meilleure accumulation sans entrave des matières actives, mais constitue également la meilleure prophylaxie contre les maladies telles que l’oïdium et la pourriture de la vigne. Les essais du FiBL ont montré que l’élimination des feuilles dans la zone des raisins réduisait de plus de 80 % la pourriture des raisins due au Botrytis. En outre, la meilleure exposition des raisins à la lumière entraîne un enrichissement accru en sucres et en substances aromatiques, ce qui a un effet favorable sur la qualité du vin, notamment des vins rouges.

Les produits phytosanitaires sont-ils également testés au FiBL et comment cela se déroule-t-il?
Oui, dans le domaine de la protection des plantes au FiBL, des centaines d’agents biocompatibles ont été testés ces dernières années pour leur efficacité, notamment contre la principale maladie, l’oïdium. Nous voulons également réduire davantage l’utilisation déjà très faible du cuivre, voire le remplacer complètement, et rendre le succès de la protection des plantes encore plus fiable. Le département de phytopathologie teste d’abord les agents sur des plants de vigne dans les chambres climatiques, où l’on peut simuler une température et une humidité idéales pour la propagation de la maladie. Les petits plants de vigne sont traités avec l’agent, puis infectés artificiellement par le champignon de la maladie. Ensuite, la propagation de la maladie est comparée à celle d’une plante témoin non traitée, et évaluée.

Les agents efficaces issus de cette première phase de test sont ensuite testés de manière plus poussée dans la parcelle expérimentale en plein champ. Cela montre si l’effet de ces agents, souvent d’origine végétale ou minérale, est également suffisant dans des conditions naturelles – sous l’influence des précipitations et du soleil. Par la suite, seuls les quelques agents jugés efficaces feront l’objet d’essais pratiques supplémentaires dans les vignobles du FiBL et chez les viticulteurs bio.
 

Où en sommes-nous avec l’utilisation des drones?
C’est certainement une technologie intéressante, mais elle doit encore être développée. Les avantages résident dans la réduction de la contamination du sol et, en combinaison avec les systèmes de prévision, qui sont également développés au FiBL, dans le fait que le traitement peut ainsi être ciblé plus précisément en fonction des événements d’infection.

Vignoble FiBL

Le vignoble certifié par Bio Suisse s’étend sur quatre hectares sur une pente ensoleillée orientée au sud dans le Fricktal. Outre les variétés traditionnelles telles que le Pinot Noir, le Gewürztraminer et le Chardonnay, de plus en plus de nouveaux cépages résistants aux champignons sont cultivés. Dans la cave à vin moderne, plus de 40 variétés différentes de vins bio sont vinifiées. Du vin blanc, du vin rouge, des vins mousseux, des rosés et des vins naturels, qui mûrissent presque sans additifs ni autres interventions grâce à une fermentation spontanée dans la cave. Lors du prix Vin Bio Suisse 2021, deux vins sont été récompensé.

Que fait la recherche sur les variétés résistantes aux maladies pour réduire l’utilisation des produits phytosanitaires? C’est ce qu’on appelle également le PiWi (cépages résistants aux champignons).
La promotion de variétés tolérantes aux maladies est l’approche la plus importante pour une orientation plus écologique de la production de vin! De grands efforts sont faits en conséquence. Ces dernières années, diverses institutions de sélection en Suisse et à l’étranger ont produit des variétés dont les vins peuvent être comparés en qualité aux vins conventionnels. La culture s’est développée, notamment dans l’agriculture bio en Suisse alémanique. L’objectif de la recherche est de tester l’aptitude de ces variétés à la culture en collaboration avec les praticiens et de cibler les optimisations en matière de vinification. La forte réduction de la protection phytosanitaire signifie également une réduction de la pollution des sols, des émissions, des coûts et moins de stress pour le vigneron. En outre, la culture plus extensive favorise également la biodiversité. La culture de ces nouvelles variétés sort de plus en plus de la niche. Parce qu’ils sont de mieux en mieux commercialisés, ces vins issus de nouvelles variétés encore inconnues trouvent de plus en plus souvent le chemin des grands distributeurs grâce à des concepts marketing appropriés.

Quel est votre souhait pour la viticulture biologique de demain?
Je souhaite que le potentiel des cépages robustes et les avantages des nombreux vignobles jouissant d’une remarquable exposition fortement ensoleillée soient encore plus développés pour augmenter la biodiversité et que les impulsions de la viticulture biologique se propagent encore plus fortement dans l’ensemble de la viticulture.

 Maya Frommelt en entretien avec Andreas Häseli, Images: Maya Frommelt

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